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Ravel : Bolero / Strauss : Don Quichotte

Le Boléro de Maurice Ravel est sans doute la partition la plus connue du public dans le registre classique. Cette musique de ballet composée à l’attention de la danseuse et riche mécène russe Ida Rubinstein qui avait commandé au compositeur un “ballet de caractère espagnol” dépasse largement les codes de la chorégraphie, pour atteindre une plénitude sonore extraordinaire. Ravel imagina une phrase musicale unique devenue le corps d’un mouvement de danse d’un seul tenant, au rythme et au tempo invariable, infinies modulations d’une seule mélodie. Seule l’orchestration est toujours changeante et la mélodie circule à tous les pupitres, pendant un lent crescendo qui soudain explose littéralement. Projet théorique en apparence, qui pourrait se révéler sec et scolaire, il eut dès la première audition un effet hypnothique sur le public, qui ne s’est jamais démenti, et provoque son enthousiasme absolu. Parce que la partition repose sur le seul principe de répétition, elle décontenança bon nombre de compositeurs qui assistèrent à la création, comme par exemple Florent Schmitt. D’autres relèvent les prouesses d’instrumentation, comme Charles Koechlin, qui indique dans son célèbre Traité de l’orchestration (1954) que “toute cette partition est à étudier en détail, pour l’équilibre et la gradation des sonorités”. Mais il s’agit surtout d’entendre le Boléro comme une partition qui vous accroche doucement en vous interrogeant par cette percussion lancinante du début, pour ne plus vous lâcher jusqu’à l’apothéose ! 

En complément, le Don Quichotte de Richard Strauss est un magnifique poème symphonique avec violoncelle soliste : ces « Variations fantastiques sur un thème à caractère chevaleresque » composées en 1898 sont devenues une partition culte des orchestres symphoniques. Le violoncelle incarne le personnage de Don Quichotte, tandis que la clarinette basse, le tuba et l’alto jouent le motif bucolique et malicieux qui caractérise son fidèle serviteur, Sancho Pança. La plupart des aventures du chevalier sont décrites : le combat contre le troupeau de moutons, les moulins à vent ou le vol dans les airs. Mais surtout, Strauss s’est dépeint lui-même dans cette œuvre, à travers le caractère à la fois fantasque et nostalgique de Quichotte, et son combat désespéré et ridicule pour trouver l’amour… Œuvre splendide, ce Don Quichotte requiert toutes les couleurs de l’Orchestre National d’Île-de-France, dirigé avec fougue par son chef Case Scaglione, avec le violoncelliste star Johannes Moser, un allemand qui fait vibrer les plus belles salles de concert du monde de son énergie indomptable!